Loi d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid 19 : le volet urgence sanitaire

Le texte prévoit l’entrée en vigueur de l’état d’urgence sanitaire sur l’ensemble du territoire national pour une durée de deux mois dès l’entrée en vigueur de la loi.

La loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19 a été publiée au Journal officiel du 24 mars 2020. Son titre Ier crée un état d’urgence sanitaire.

Le nouveau chapitre du Code de la santé publique, issu du titre Ier de la loi du 24 mars 2020 et intitulé : « État d’urgence sanitaire » comprend les articles L. 3131-12 à L 3131-20. Ce chapitre, a la particularité de créer un régime juridique temporaire, qui ne pourra s’appliquer que jusqu’au 1er avril 2021.

Déclaration de l’état d’urgence sanitaire

En cas de catastrophe sanitaire mettant en péril, par sa nature et sa gravité, la santé de la population, le Conseil des ministres, décide par décret, à la suite d’un rapport du ministre chargé de la santé, de déclarer l’état d’urgence sanitaire (EUS). Ce décret est motivé et détermine la ou les circonscriptions territoriales à l’intérieur desquelles il entre en vigueur et reçoit application (tout ou partie du territoire métropolitain, territoire des collectivités, DOM-ROM-COM, et Nouvelle‑Calédonie). Les données scientifiques disponibles sur la situation sanitaire qui ont motivé la décision sont rendues publiques.

L’Assemblée nationale et le Sénat sont informés sans délai des mesures prises par le gouvernement au titre de l’EUS. Le parlement peut requérir toute information complémentaire dans le cadre du contrôle et de l’évaluation de ces mesures.

Prorogation

Au-delà d’un mois, la prorogation de l’EUS ne peut être autorisée que par la loi, après avis du comité de scientifiques. La loi fixe la durée de prorogation. Mais, par décret en Conseil des ministres, il peut être mis fin à l’EUS avant la fin du délai légal.

Toutefois, la loi d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19 prévoit une dérogation à la prorogation. En effet, l’état d’urgence sanitaire est déclaré pour une durée de deux mois sur la totalité du territoire national à compter de l’entrée en vigueur de la loi. Mais un décret pris en Conseil des ministres pris sur le rapport du ministre chargé de la santé pourra en limiter l’application à certaines des circonscriptions territoriales qu’il précise. Après les deux mois, la prorogation peut être uniquement décidée par la loi. Par ailleurs, un décret en Conseil des ministres peut mettre fin l’EUS.

Restrictions des libertés

L’article L. 3131‑15 du Code de la santé publique liste dix domaines pour lesquels les mesures restrictives de liberté qui peuvent être prises dans les circonscriptions territoriales où l’état d’urgence sanitaire est déclaré dans le seul but de garantir la santé publique. A cette fin, le Premier ministre peut prendre des mesures par décret sur le rapport du ministre chargé de la santé.

 1° Restreindre ou interdire la circulation des personnes et des véhicules dans les lieux et aux heures fixés par décret ;

2° interdire aux personnes de sortir de leur domicile, sous réserve des déplacements strictement indispensables aux besoins familiaux ou de santé ;

3° ordonner des mesures ayant pour objet la mise en quarantaine, au sens de l’article 1er du règlement sanitaire international de 2005, des personnes susceptibles d’être affectées ;

4° ordonner des mesures de placement et de maintien en isolement, …, à leur domicile ou tout autre lieu d’hébergement adapté, des personnes affectées ;

5° ordonner la fermeture provisoire d’une ou plusieurs catégories d’établissements recevant du public ainsi que des lieux de réunion, à l’exception des établissements fournissant des biens ou des services de première nécessité ;

6° limiter ou interdire les rassemblements sur la voie publique ainsi que les réunions de toute nature ;

7° ordonner la réquisition de tous biens et services nécessaires à la lutte contre la catastrophe sanitaire ainsi que de toute personne nécessaire au fonctionnement de ces services ou à l’usage de ces biens. L’indemnisation de ces réquisitions est régie par le code de la défense ;

8° prendre des mesures temporaires de contrôle des prix de certains produits rendues nécessaires pour prévenir ou corriger les tensions constatées sur le marché de certains produits ; le Conseil national de la consommation est informé des mesures prises en ce sens ;

9° en tant que de besoin, prendre toute mesure permettant la mise à disposition des patients de médicaments appropriés pour l’éradication de la catastrophe sanitaire ;

10° en tant que de besoin, prendre par décret toute autre mesure réglementaire limitant la liberté d’entreprendre, dans la seule finalité de mettre fin à la catastrophe sanitaire mentionnée à l’article L. 3131‑12. »

Toute violation des interdictions ou obligations est punie d’une amende de 135 euros. En cas de récidive dans un délai de quinze jours, la contravention peut aller de 1 500 à 3 000 euros. Si les violations se répètent à plus de trois reprises dans un délai de trente jours, les faits sont punis de six mois d’emprisonnement et de 3 750 euros d’amende ainsi que d’une peine complémentaire de travail d’intérêt général

La loi précise que ces mesures doivent être strictement proportionnées aux risques sanitaires encourus et appropriées aux circonstances de temps et de lieu. Par ailleurs, quand elles ne sont plus nécessaires, il y est mis fin sans délai.

Outre les officiers et agents de police judiciaire, les agents de police municipale, agents de surveillance et gardes champêtres peuvent également procéder à la constatation de ces infractions.

De plus, afin de prendre des mesures dans les dix domaines définis par la loi, le Premier ministre doit désormais prendre un décret (et non plus par arrêté comme cela était prévu au début de la crise sanitaire).

C’est pourquoi le décret n° 2020-293 du 23 mars 2020 prescrit les nouvelles mesures générales nécessaires pour faire face à l’épidémie de covid-19 dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire.

L’ article 3 du décret précité interdit ainsi et jusqu’au 31 mars 2020, tout déplacement de personne hors de son domicile est interdit à l’exception des déplacements pour les motifs suivants en évitant tout regroupement de personnes :
1° trajets entre le domicile et le ou les lieux d’exercice de l’activité professionnelle et déplacements professionnels insusceptibles d’être différés ;
2° déplacements pour effectuer des achats de fournitures nécessaires à l’activité professionnelle et des achats de première nécessité dans des établissements dont les activités demeurent autorisées par l’article 8 du présent décret ;
3° déplacements pour motifs de santé à l’exception des consultations et soins pouvant être assurés à distance et, sauf pour les patients atteints d’une affection de longue durée, de ceux qui peuvent être différés ;
4° déplacements pour motif familial impérieux, pour l’assistance des personnes vulnérables et pour la garde d’enfants ;
5° déplacements brefs, dans la limite d’une heure quotidienne et dans un rayon maximal d’un kilomètre autour du domicile, liés soit à l’activité physique individuelle des personnes, à l’exclusion de toute pratique sportive collective et de toute proximité avec d’autres personnes, soit à la promenade avec les seules personnes regroupées dans un même domicile, soit aux besoins des animaux de compagnie ;
6° déplacements résultant d’une obligation de présentation aux services de police ou de gendarmerie nationales ou à tout autre service ou professionnel, imposée par l’autorité de police administrative ou l’autorité judiciaire ;
7° déplacements résultant d’une convocation émanant d’une juridiction administrative ou de l’autorité judiciaire ;
8° déplacements aux seules fins de participer à des missions d’intérêt général sur demande de l’autorité administrative et dans les conditions qu’elle précise.

Les personnes souhaitant bénéficier de l’une de ces exceptions doivent se munir, lors de leurs déplacements hors de leur domicile, d’un document leur permettant de justifier que le déplacement considéré entre dans le champ de l’une de ces exceptions.

A noter que le préfet  est habilité à adopter des mesures plus restrictives en matière de trajets et déplacements des personnes lorsque les circonstances locales l’exigent.

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