Grande mobilisation pour l’école : un éventail de mesures hétérogènes

Par Françoise Dumont, membre du Comité central de la LDH

 

Le 22 janvier, Manuel Valls et Najat Vallaud-Belkacem ont annoncé les onze mesures qui doivent constituer la « Grande mobilisation pour l’école ». L’ensemble du plan a un petit côté « auberge espagnole » : on y trouve des mesures qui fleurent bon le retour à la tradition, des innovations, des mesurettes symboliques, mais aussi des dispositifs innovants destinés à lutter contre l’échec et la ségrégation scolaires.

L’ensemble se décline en quatre volets : laïcité et transmission des valeurs républicaines, citoyenneté et culture de l’engagement, réduction des inégalités et renforcement du sentiment d’appartenance à la République, mobilisation de l’Enseignement supérieur et de la recherche. Si toutes les dispositions ne concernent pas directement la LDH, certaines d’entre elles sont au cœur même de ce qui constitue notre ADN. Il est donc important de faire reconnaître la Ligue comme un véritable partenaire, déterminée et apte à apporter sa réflexion et son expertise, en particulier sur les points qui touchent à la laïcité, la citoyenneté, la lutte contre les discriminations, le racisme et l’antisémitisme.

En ce qui concerne le volet « laïcité et transmission des valeurs républicaines », le plan prévoit que, d’ici à la fin de l’année scolaire, mille éducateurs seront formés sur deux jours aux questions relatives à la laïcité et à l’enseignement moral et civique, afin de pouvoir répondre au besoin d’accompagnement de leurs pairs. Cet enseignement moral et civique, dont le contenu sera connu à la fin mai, constituera l’épine dorsale du futur « parcours éducatif citoyen », qui sera obligatoire pour tous les élèves, de l’école élémentaire au lycée, y compris au lycée professionnel, et qui sera évalué en fin de scolarité obligatoire.

Par ailleurs, les comportements mettant en cause les valeurs de la République seront systématiquement signalés au directeur d’école ou au chef d’établissement et suivis, le cas échéant, d’une sanction disciplinaire. Sur ce plan, la ministre a fait part de son souhait de voir les mesures de réparation mieux utilisées à l’école. Il est également prévu que les rites républicains soient valorisés : une journée de la laïcité sera célébrée dans tous les établissements le 9 décembre, les projets d’école devront s’emparer des semaines spécifiques (avec notamment la relance de la semaine de lutte contre le racisme et l’antisémitisme) et des commémorations patriotiques. Des temps annuels de rencontre et d’échange avec l’ensemble de la communauté éducative (remise de diplômes, fêtes de fin d’année…) devront aussi être prévus.

Le volet « citoyenneté et culture de l’engagement » prévoit la mise en place, dans chaque académie, d’une « réserve citoyenne » qui viendrait en appui aux établissements. Seront notamment sollicités pour y participer les bénévoles d’associations partenaires au plan local. Il est également prévu de développer des espaces parents et d’associer ceux-ci à la mise en place d’un comité départemental d’éducation à la santé et à la citoyenneté. Le plan évoque aussi le renforcement des liens avec l’éducation populaire et les associations de lutte contre le racisme et l’antisémitisme. Il est clair que, là aussi, la LDH est directement concernée.

A la lecture de ces mesures, on peut légitimement se demander si, pour sauver les valeurs de la République, il suffira de les enseigner ou de les célébrer. A n’en pas douter, c’est bien la partie « lutte contre les inégalités » qui sera déterminante. La ministre a déjà annoncé sa volonté de mettre en place une nouvelle politique d’affectation des moyens et de travailler à une réforme de la carte scolaire. « Il est temps de prendre nos responsabilités pour enrayer le séparatisme social dans les établissements scolaires », a-t-elle dit. Dont acte !

 

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