Une école gage de paix pour un « destin commun »

Par Jeannette Bole, LDH de Nouvelle-Calédonie.

A l’heure du « destin commun » la Nouvelle-Calédonie doit se doter d’un enseignement à la hauteur de ce défi. Une école décolonisée pour vivre ensemble notre multiculturalité. Après le temps de la colonisation, voici le temps du partage. Notre école ne doit être en aucun cas un creuset de discriminations. Découvrir la culture de l’autre,  la reconnaître, la vivre sont des matériaux qui construisent la grande case du « vivre ensemble » car choisir notre enseignement, notre école, c’est aussi choisir notre société.

La Ligue des droits de l’Homme de Nouvelle-Calédonie (LDH-NC) a pour objectif de soutenir le processus de l’Accord de décolonisation et de promouvoir la volonté de construire ensemble la communauté de destin. Pour cela, la LDH-NC est organisée autour de cinq commissions et parmi elles, il y a la commission “Transculturalité”.

La transculturalité vise bien plus qu’une acceptation, une connaissance ou une reconnaissance de l’Autre. Elle impulse dans les différentes cultures le désir de « construire ensemble ». Elle s’intéresse à la manière dont les cultures se rencontrent, entrent en contact, s’interpénètrent  pour finalement trouver des passerelles entre elles. Tout cela en préservant les bases culturelles de chacune.

Notre approche transculturelle  s’inscrit totalement dans le respect de l’Accord de Nouméa. Elle nécessite donc  une vigilance dans son application vis-à-vis du peuple premier car c’est bien autour de lui, que s’articule l’accord de Nouméa. La commission a fait le choix de travailler dans le domaine de « l’enseignement » en organisant une conférence-débat publique cette année.

L’école est une des premières loges de destin commun où tous les enfants de diverses cultures se côtoient au quotidien Mais  l’histoire coloniale et la  mondialisation ont laissé leurs empreintes.Elles ont fait de l’école le creuset de discriminations sociales mais aussi culturelles Ces discriminations contribuent  encore fortement à entretenir l’échec scolaire des enfants kanak, et plus largement des enfants océaniens.

L’école d’aujourd’hui, malgré les progrès d’adaptation des programmes, reste encore très fortement calquée sur le modèle occidental. L’école véhicule prioritairement  une seule culture et ne prend pas assez en compte les diversités culturelles des enfants. Il en résulte que la population autochtone du territoire doit dans tous les domaines constamment s’adapter à des modèles occidentaux qui se veulent universels. L’élève, l’enfant, est alors obligé de remettre  en question ses fondamentaux culturels.

L’objectif de la conférence-débat du 18 septembre était de sensibiliser les participants sur les problématiques liées à l’échec scolaire et de constater que l’école a bien du mal à appréhender les déterminants  culturels de l’enfant. En effet, il ne suffit pas de remplacer un pommier par le bagnan pour prendre en compte la spécificité culturelle.

Plusieurs spécialistes ont été invités. Ils ont mis en place des petits outils pédagogiques. Ainsi Solange Ponidja, enseignante estime qu’il faut une que la langue maternelle soit avant tout bien acquise pour permettre à l’enfant de développer son schéma de pensée. Richard Wamynia, enseignant et docteur en sciences de l’éducation, il va au-delà de la langue et part des habitudes de vie des enfants pour leur apprendre des mathématiques (exemple : c’est à partir d’une  construction de la case, qu’il va leur enseigner les règles arithmétiques, les figures géométriques…).

A la suite de cette conférence-débat, la commission va éditer un livret d’une trentaine de pages, qui puisse être lisible par tout le monde et qui va être distribué gratuitement dans les trois provinces du Pays. Elle établira une charte intitulée « Notre école pour vivre ensemble » et en parallèle, toujours dans la volonté de sensibilisation, la commission écrira une lettre ouverte à la ministre de l’Education nationale et aux élus chargés de l’enseignement en Nouvelle-Calédonie.

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