Neuf organisations attaquent devant le CE une ordonnance qui viole les droits des étrangers à Mayotte

Communiqué du collectif Mom
Département français depuis le 1er avril 2011, ce petit territoire de l’océan Indien est désormais une région « ultrapériphérique » de l’Union européenne à compter du 1er janvier 2014. Sa législation doit donc se conformer aux normes européennes et nationales.

L’entrée en vigueur à Mayotte, le 26 mai 2014, du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (Ceseda) était très attendue. En effet, le régime dérogatoire qui s’applique à Mayotte n’a cessé d’être dénoncé par nos organisations et par les autorités indépendantes (défenseur des droits, contrôleur des lieux de privation de liberté) qui se sont intéressées à la situation des personnes étrangères.Or, si l’ordonnance du 7 mai 2014 [1] signée par le ministre de l’intérieur étend l’application du Ceseda à Mayotte, elle comporte tant de dérogations que, de l’aveu de ses auteurs, elle n’a qu’« un impact limité sur le droit au séjour des étrangers » [2].

Ainsi une personne de nationalité étrangère qui fait l’objet d’une obligation à quitter le territoire français bénéficie, en métropole, d’au moins quarante-huit heures pour en demander l’annulation auprès du tribunal administratif et l’exécution de l’éloignement est alors suspendue jusqu’à la décision du juge. À Mayotte, elle peut être expulsée en quelques heures.

De même, une personne à qui l’entrée en métropole est refusée peut disposer au moins d’un jour pour faire valoir ses droits ; ce n’est pas le cas à l’arrivée à Mayotte.

Le jeune étranger résidant en métropole depuis ses treize ans se voit délivrer de plein droit à ses 16 ou 18 ans une carte de séjour mention vie privée et familiale s’il a résidé avec l’un des ses parents. À Mayotte, ce parent doit avoir été en situation régulière durant cette période ce qui exclut 90 % d’entre eux. D’autres obstacles continueront à bloquer, à Mayotte, des accès à un titre de séjour reconnus en métropole.

Un titre de séjour délivré en métropole permet de circuler librement sur l’ensemble du territoire français. Délivré à Mayotte, il ne permet de circuler… qu’à Mayotte.

Le gouvernement avait la possibilité de mettre fin à ces dispositifs dérogatoires et discriminatoires. Il a choisi de les conserver malgré les violations quotidiennes de droits fondamentaux qui en résultent à Mayotte et leur impact sur la santé et l’avenir des populations concernées.

Pour que cesse ce régime d’exception, les organisations signataires ont déféré au Conseil d’État l’ordonnance du 7 mai 2014.

Signataires : Aides, Amoureux au ban public, Anafé, La Cimade, Fasti, Gisti, Ligue des droits de l’Homme, Médecins du monde, Syndicat de la magistrature

[1] Ordonnance n° 2014-464 du 7 mai 2014 portant extension et adaptation à Mayotte du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (partie législative)

[2] Rapport au Président de la République relatif à l’ordonnance n° 2014-464 du 7 mai 2014

Paris, le 24 juin 2014

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