Lettre ouverte à l’attention du Président de la République concernant la demande d’asile de Julian Assange

Lettre ouverte signée par 10 organisations, dont la LDH, concernant la demande d’asile de Julian Assange à la France

 

Monsieur le Président,

La Ligue des droits de l’Homme (LDH), la Fédération internationale des Ligues des droits de l’Homme (FIDH), la Maison des lanceurs d’alertes, le Syndicat national des journalistes (SNJ), le SNJ-CGT, Reporters sans frontières (RSF), la Fédération internationale des journalistes (FIJ), la Fédération européenne des journalistes (FEJ), Solidaires et  l’UGICT-CGT vous demandent d’apporter une réponse positive à la demande d’asile à la France formellement déposée par Julian Assange.

Comme vous le savez, Julian Assange, citoyen australien, fondateur de Wikileaks, est en ce moment devant des juges britanniques qui examinent la possibilité de l’extrader vers les Etats-Unis.

Les conditions de son arrestation à Londres, en avril 2019, ainsi que celles de sa détention depuis lors dans la prison de haute sécurité de Belmarsh (conditions jugées assimilables à des actes de torture par le Rapporteur spécial des Nations unies sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, Nils Melzer), nous font craindre une décision d’extradition vers un pays où il risque une peine de cent soixante-quinze ans de prison.

Toutes les informations disponibles quant à l’acte d’accusation reposant sur la loi sur l’espionnage votée en 1917, en période de guerre, la nature large et vague des allégations et des infractions énumérées, de même que les conditions de détention qui attendent Julian Assange aux Etats-Unis, nous font craindre qu’il ne jouisse pas des conditions d’un procès équitable (ce qui serait contraire à l’article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales du Conseil de l’Europe, CEDH), d’autant plus que son état de santé amenuiserait ses capacités à prendre part à sa propre défense. Les risques encourus de torture ou de traitements inhumains ou dégradants seraient contraires à l’article 3 de la CEDH que le Royaume-Uni, mais aussi la France, sont tenus de respecter.

Les informations que Julian Assange a publiées sont d’intérêt public et ont contribué au droit à l’information du plus grand nombre. C’est pourquoi la France, fidèle à sa tradition et à sa Constitution qui prévoit que « les autorités de la République ont toujours le droit de donner asile à tout étranger persécuté en raison de son action en faveur de la liberté », s’honorerait d’accorder à Julian Assange l’asile politique pour des raisons humanitaires, compte tenu des dangers qui le menacent et des attaches familiales qui le lient à la France d’une part, et d’autre part pour la sauvegarde de la liberté d’informer, la liberté de la presse et des valeurs démocratiques.

Vous comprendrez que cette démarche soit rendue publique.

Nous espérons qu’une suite favorable sera donnée à la présente et nous vous prions d’agréer, Monsieur le Président de la République, l’expression de notre haute considération.

 

Signataires : Malik Salemkour, Président de la LDH ; Ricardo Gutierrez, Secrétaire général de la FEJ ; Alice Mogwe, Présidente de la FIDH ; Anthony Bellanger, Secrétaire général de la FIJ ; Arnaud Apoteker et Nadège Buquet, Co-présidents de la Maison des lanceurs d’alerte ; Emmanuel Poupard, Secrétaire général du SNJ ; Emmanuel Vire, Secrétaire général du SNJ-CGT ; Christophe Deloire, Secrétaire général de RSF ; Eric Beynel, porte-parole de Solidaires ; Sophie Binet et Marie-José Kotlicki, Co-secrétaires générales de l’UGICT-CGT.

 

Paris, le 27 février 2020

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