Le Conseil constitutionnel sauve l’essentiel de la loi sur l’immigration et consacre la régression de l’état de droit

La décision du Conseil constitutionnel concernant la loi sur la maîtrise de l’immigration sauve l’essentiel du texte présenté par le ministre de l’Intérieur et adopté par le Parlement.

En censurant deux dispositions, l’une relative au mariage, l’autre relative à la responsabilité financière des personnes qui accueillent un étranger et, en émettant deux réserves d’interprétation dont la portée est très limitée, le Conseil constitutionnel a gommé quelques unes des dispositions les plus scandaleuses de cette loi. Dans le même temps, il illustre, a minima, le peu de cas que le ministre de l’Intérieur fait des libertés fondamentales.

Cet Arrêt consacre un droit d’exception au préjudice des étrangers, valide des mesures qui portent atteinte à leur intégration et bat en brèche le principe, jusqu’ici acquis, selon lequel le Conseil constitutionnel s’interdisait, en matière de libertés, de remettre en cause un droit acquis.

Usant de raisonnements qui confinent à l’absurde – ainsi les gardes privés pourront être armés pour leur sécurité personnelle mais pas pour surveiller les personnes qu’ils transportent… – , le Conseil constitutionnel va jusqu’à entériner l’omniprésence du Parquet et de l’Administration face à des droits de la défense devenus quasi inexistants. En fait, le Conseil constitutionnel se contente de garanties illusoires en s’abstenant de vérifier leur effectivité ; notamment en acceptant que se tiennent des audiences dans des lieux inaccessibles au public.

L’analyse de la Haute Juridiction s’inscrit dans la logique de suspicion, de discrimination et de mépris des libertés individuelles qui traverse toute la politique du gouvernement en matière d’immigration et d’asile.

Plus largement, elle constitue une régression de l’Etat de droit. A la suite de l’Arrêt déjà rendu à propos de la loi sur la sécurité intérieure, cette décision force à s’interroger sur la composition d’une Juridiction dont la jurisprudence paraît dépendre plus d’une démarche politique, que du respect des principes de la République.

Paris, le 21 novembre 2003

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