Jusqu’à quand et jusqu’où ?

Le gouvernement israélien a assassiné un chef de guerre du Hamas, provoquant en même temps et de manière délibérée, la mort de 14 civils dont de nombreux enfants. Cette pratique déjà ancienne d’assassinats extrajudiciaires constitue une infraction patente aux lois et coutumes de la guerre. Utiliser, pour cela, un armement qui ne pouvait que porter gravement atteinte à des populations civiles relève du crime de guerre.

L’action menée par l’armée israélienne s’inscrit dans la même logique de terreur que l’on voit quotidiennement à l’œuvre en Cisjordanie. Certes, le gouvernement de M. Sharon met en avant les victimes civiles israéliennes d’un terrorisme insupportable pour justifier sa propre violence contre d’autres civils. Mais l’horreur commise par les uns ne saurait justifier l’horreur commise par les autres.

En agissant de cette manière, le gouvernement israélien ne commet pas une bavure, il use d’un terrorisme d’État qui n’est en aucune manière tolérable. C’est d’abord la société israélienne qui doit demander des comptes à son gouvernement. Aucune démocratie ne peut laisser impunie une telle violence commise en son nom. C’est ensuite à la communauté internationale de mettre en œuvre les moyens dont elle dispose pour sanctionner un comportement qui constitue un véritable défi au droit international.

Le refus d’Israël de ratifier le statut de la Cour pénale internationale, comme l’attitude prévisible du Conseil de sécurité, interdisent, aujourd’hui, de saisir cette juridiction de manière utile. En revanche, il faut rappeler avec force les termes la IVème Convention de Genève qu’Israël vient de violer une fois encore de manière manifeste. Elle fait obligation à tous les Etats parties à cette convention de faire respecter le droit international humanitaire et de rechercher et sanctionner, y compris devant leurs propres tribunaux, les auteurs, quelle que soit leur nationalité, des crimes de guerre commis.

En se contentant de condamnations purement verbales et de remontrances visiblement sans effet, la communauté internationale s’expose une fois de plus, à l’accusation d’appliquer une politique de « deux poids, deux mesures ». Enfin, ce qui vient de se passer à Gaza illustre jusqu’à la caricature l’impasse dans laquelle, avec la caution des Etats-Unis, s’enferme le gouvernement israélien.

En rejetant la création d’un Etat palestinien conforme aux résolutions internationales et en soumettant l’ensemble du peuple palestinien à un déni quotidien de ses droits les plus élémentaires, M. Sharon ne pourra qu’aller toujours plus loin dans la voie d’une violence qui n’épargnera pas les populations civiles. Là encore, c’est à la communauté internationale de rappeler au gouvernement d’Israël, que sa sécurité ne peut résulter de l’usage de F-16 mais de la reconnaissance des droits du peuple palestinien.

Sidiki Kaba, président de la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH)
Michel Tubiana, pPrésident de la Ligue française des droits de l’Homme, vice président de la FIDH

Paris, le 25 juillet 2002

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