Plateforme commune du COS

3.2. Pour surmonter les difficultés évoquées précédemment, il est nécessaire de constituer des plages de liberté hors desquelles le contrat serait nul. Plusieurs pistes de réflexion peuvent s’ouvrir.

a) Celle du contrat de travail. Rien ne s’oppose à sa conclusion, même si certaines dérogations au code du travail sont inéluctables. Cependant, il faut en finir avec le mythe d’une administration pénitentiaire employeur alors que dans les ateliers en concession le détenu travaille pour un employeur privé, représenté d’ailleurs par un ou plusieurs contremaîtres ou techniciens. Le détenu devrait être lié par contrat avec son véritable employeur, l’administration pénitentiaire intervenant en tiers.

b) Celle du contrat de formation en vue d’acquérir une qualification avec l’organisme prestataire de formation. L’administration pénitentiaire interviendrait pour garantir, entre autres, que le détenu ne sera pas transféré avant la fin du contrat. Et pourquoi ne pas envisager un contrat d’insertion dans le cadre de la législation du R.M.I. ?

c) Celles du contrat de permission de sortir, d’U.V.F, de transfert dans une structure à sécurité allégée, etc. En un mot tout ce qui devrait jalonner un parcours dynamique.

Mais l’intérêt principal est sans doute qu’une utilisation généralisée du contrat suppose un profond changement dans la définition de la tâche du personnel pénitentiaire et par conséquent de sa culture et de ses réflexes professionnels. Car il n’y a pas de contrat, faut-il le rappeler ? sans un minimum de confiance dans la parole et la signature de l’autre. Les personnels ont beaucoup à y gagner. Entrer dans des relations fondées sur des droits et des obligations réciproques ferait sortir tout le monde de l’arbitraire inhérent à toute structure strictement hiérarchisée et fondée sur le commandement. La fonction et le statut de surveillant se verraient enfin reconnus à la hauteur de la tâche assumée.

3.3. Est-il besoin d’ajouter que l’usage des contrats en milieu ouvert rencontre beaucoup moins de difficultés qu’en milieu fermé. Les aménagements de peines, les sanctions non carcérales supposent toujours un contrat -souvent tacite- entre la personne condamnée et l’institution judiciaire représentée par un tribunal, un magistrat ou le SPIP.

Ainsi la condamnation, à un Travail d’Intérêt Général n’est possible que si la personne y consent. Ainsi, par définition , une libération conditionnelle suppose l’acceptation de certaines obligations dont le non-respect conduit à la révocation. Sans doute serait-il utile de formaliser davantage ces engagements et de conclure de tels contrats.

Une politique contractuelle suppose évidemment que soient dégagés les moyens de sa mise en œuvre. Mais est-ce bien au Ministère de la Justice de les inscrire à son budget ? La prison est dans la Cité. Elle est un service public. Les populations qui y sont retenues doivent pouvoir bénéficier des crédits affectés à la formation, à la santé, à l’insertion de l’ensemble de nos concitoyens. Ce qui nous ramène à la notion controversée mais singulièrement stimulante du détenu citoyen.

Le 12 juillet 2001

LISTE DES PREMIERS SIGNATAIRES :

Guy-Bernard BUSSON, président de la Fédération nationale des associations d’accueil et de réinsertion sociale (FARAPEJ)
Roger-Vincent CALATAYUD, président de la commission des droits de l’Homme du consil natioal des Barreaux
Antoinette CHAUVENET, directrice de recherches au CNRS
Liliane CHENAIN
Liliane DALIGAND, présidente de la Société française de victomologie, présidente du Conseil scientifique de l’Institut national d’aide aux victimes et de médiation (INAVEM)
Jean-Louis DAUMAS, directeur du centre de détention de Caen
Pascal FAUCHER, maître de conférences à l’École nationale de la magistrature
Anne-Marie MASSON, directrice des services pénitentiaires d’insertion et de probation des Yvelines
Marie-José STRICKLER, vice présidente de la Fédération nationale des associations d’accueil et de réinsertion sociale (FNARS)
Michel TUBIANA, président de la Ligue des droits de l’Homme

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