8 février 2006 – violence urbaine
Violences urbaines, urgence sociale : réaffirmer le pacte démocratique contre le racisme et pour l’égalité

La flambée de violences qui a embrasé un grand nombre de quartiers populaires pendant près de trois semaines est le symptôme d’une crise d’une extrême gravité. Elle intervient dans un contexte de régression sociale, d’accroissement de la précarité et des inégalités auquel se surajoutent les effets de discriminations, de ségrégations et de stigmatisations durables voire croissantes.

 

Nous ne pouvons que désapprouver des actes de violences dont les victimes sont précisément, directement et indirectement, celles et ceux qui subissent déjà un sort détestable. A l’expression d’une révolte qui aurait pu être porteuse d’espoir se sont substitués des comportements autodestructeurs qui attestent le délitement du tissu social et le désespoir que vivent nombre de jeunes de ces quartiers.

 

Mais rétablir la tranquillité publique ne saurait légitimer une réponse purement répressive et encore moins le recours à des mesures d’exception. L’institution de l’état d’urgence n’était admissible ni sur le terrain de la proportionnalité aux troubles à la date de sa mise en vigueur, ni sur celui de références symboliques en l’espèce désastreuses.

 

De surcroît, l’inflation de mensonges tentant d’accréditer une explication religieuse, communautaire voire ethnique de ces événements nous inquiète au plus haut point : cette explosion sociale n’a pas pour cause la polygamie ou l’immigration. Au prix d’amalgames intolérables, faire des étrangers, et en définitive de ceux qui leur ressemblent, les boucs émissaires de nos problèmes a toujours été, dans l’histoire de la République, le début des pires dévoiements. Ces attitudes et ces propos ont ouvert un espace qui légitime le racisme et les mesures discriminatoires.

 

Nous sentons poindre le moment où l’exploitation des haines et des peurs qui rongent le pacte démocratique l’emportera sur le légitime débat politique.

 

Il est de notre responsabilité de mettre en garde, solennellement, tous les responsables politiques de notre pays. Ce ne sont ni les textes ni les pratiques d’exception, et encore moins les outrances verbales, qui peuvent résoudre cette crise, mais au contraire une vigilance accrue sur le terrain de la lutte contre les discriminations et, plus fondamentalement encore, la mobilisation d’énergies et de moyens considérables au service de la cohésion sociale et du rétablissement de l’égalité des droits. Nous avons besoin d’un débat citoyen sur les urgences sociales qui se traduise en actes forts.

 

Nous en appelons à la conscience de tous pour que les principes sur lesquels se fondent notre démocratie et la République redeviennent une réalité.


 

Gérard Aschieri (Secrétaire général de la FSU)

Annick Coupé (Déléguée générale de l’Union syndicale Solidaires)

Jean-Pierre Dubois (Président de la LDH)

Alain Olive (Secrétaire général de l’UNSA)

Jean-Marc Roirant (Secrétaire général de la Ligue de l’enseignement)

Bernard Thibault (Secrétaire général de la CGT)

Paris, le 8 février

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