6 février 2006 – colonisation
Un an après la loi du 23 février 2005. Légiférer sur le passé ?

Le jeudi 23 février 2006

Faculté Jussieu, amphi 24

de 9h30 à 17h

Organisée par la Ligue des droits de l’Homme, la Ligue de l’enseignement,

et l’Appel des historiens contre la loi du 23 février 2005,

en collaboration avec

le Comité de vigilance face aux usages publics de l’histoire (CVUH).

Avec le soutien et la participation de l’UNSA éducation, de la FSU et de son Institut de recherche,

du Conseil représentatif des associations noires de France (CRAN),

de l’association Harkis et droits de l’Homme et de

l’Association des amis de Marx Marchand, Mouloud Feraoun et de leurs compagnons.

Accueil par Jean-Pierre Vallat, directeur de l’UFR

9h30 à 13h : Légiférer sur le passé ? Les lois et l’histoire.

• 10h : Analyse des lois existantes , par Henri Leclerc .

• 10h30 : La loi du 23 février 2005 : sa genèse et où en sommes-nous aujourd’hui ?  par Gilles Manceron.

• 10h40 : Deux points de vue sur les “ lois mémorielles ”, par Emmanuel Terray et Michèle Riot-Sarcey .

• 11h à 11h40 : Table ronde introduisant un débat avec la salle : Antoine Prost ; Louis-Georges Tin, Annette Wieviorka (sous réserves), Claire Mouradian, Sophie Ernst, Antoine Spire, Paul Thibaud (sous réserves), Henry Rousso (sous réserves). 

• 11h 40 à 13h : Débat avec la salle.

14h30 à 16h30 : Le passé colonial et ses enjeux actuels.

• 14h30 : Réflexions sur l’appel des historiens contre la loi : Daniel Hémery .

• 15h : Les harkis et leurs enfants et la loi du 23 février 2005 : Fatima Besnaci-Lancou.

• 15 h 05 : Approches sur l’esclavage et la colonisation : Michel Giraud, Marcel Dorigny, Zineb Ali-Benali et Pierre Kipré.

• 15h50 : Débat avec la salle.

*

Il y a un an était promulguée la loi du 23 février dont l’article 4 disposait que les “ programmes scolaires reconnaissent le rôle positif ” de la colonisation. Il a suscité un vaste mouvement de protestation en France mais aussi à l’étranger. Le président de la République, après avoir d’abord parlé de “ réécrire ” l’article, a finalement demandé au Conseil constitutionnel de l’enlever d’une loi que les parlementaires de sa majorité avaient pourtant confirmée deux mois auparavant. Mais demeure un article 3 qui crée une “ Fondation pour la mémoire et l’histoire de la guerre d’Algérie ” où des lobbies nostalgiques risquent fort de faire peser une menace sur la liberté de l’histoire. 

Paris, le 7 février 2006


Monsieur le Ministre,

Lors de votre visite en Russie le 18 janvier 2006 vous avez déclaré que « la stabilité de l’Union européenne ne peut exister que s’il y a la stabilité de la Russie ». La FIDH et son affiliée française la LDH souhaitent réaffirmer qu’une telle stabilité ne peut être garantie sans que les droits de l’Homme ne soient pleinement respectés.

Malgré la nette détérioration de la situation des libertés fondamentales en Russie ces dernières années, vous avez déclaré que les relations de ces deux pays s’inscrivaient « dans la continuité des relations franco-russes avec toujours le même niveau de confiance et d’entente remarquables ». A un journaliste qui a posé, à Moscou, une question sur la position de la France face aux violations de droits de l’Homme en Russie, vous avez répondu qu’ «il faut se garder de donner des leçons de morale faciles ».

La FIDH et la LDH rappellent qu’aucune coopération durable ne peut se faire au détriment des droits de l’Homme, et souligne que rien aujourd’hui ne peut justifier un encouragement de la politique de la Russie. Nos organisations espèrent ainsi que, à l’instar de la Chancelière allemande Madame Angela Merkel lors de sa visite récente en Russie, la France portera désormais aux violations systématiques des droits de l’Homme en Russie une attention soutenue et constante.

Ce début d’année a été marqué, juste avant votre visite, par une nouvelle atteinte à la construction de la société civile russe : une loi qui menace directement les activités des organisations non gouvernementales (ONG) russes et internationales a été approuvée par la Douma et signée par le President Poutine. Cette loi, qui entrera en vigueur le 10 avril 2006, témoigne d’une volonté très nette de contrôler, de museler les organisations indépendantes, et de limiter la présence des ONG internationales sur le territoire russe. Elle représente une menace réelle pour la société civile dans son ensemble, même si plusieurs dispositions très restrictives en ont été ôtées suite à la première lecture devant la Chambre basse, le 23 novembre 2005.

Peu après votre visite à Moscou, le gouvernement russe a lancé une campagne de diffamation médiatique contre de nombreuses organisations de la société civile et de défense des droits de l’Homme, parmi lesquelles le Groupe Helsinki, le Comité Nizhny Novgorod contre la torture, le Center for Democracy and Human Rights et le Fonds Eurasie. En effet, les 22 et 23 janvier 2006, ces ONG ont été accusées par les services de sécurité russes (FSB), dans des films diffusés par deux chaînes de télévision d’Etat – dont la chaîne RTR -, d’être financées par les services secrets britanniques.

Cette campagne de diffamation fait partie d’une opération médiatique plus vaste menée par le gouvernement contre la société civile indépendante et les défenseurs des droits de l’Homme, cibles  constantes de menaces, de campagnes de diffamation, et même de procès.

Lors de votre visite, la France a également manqué l’occasion d’aborder avec détermination la situation des droits de l’Homme en Tchétchénie, en exprimant clairement ses préoccupations. La FIDH et la LDH considèrent que la communauté internationale, qui persiste dans un soutien de plus en plus affiché à la politique « anti-terroriste » des autorités russes, porte une lourde responsabilité dans l’enlisement de ce conflit et la poursuite des violations des droits de l’Homme.

Du 25 au 30 septembre, la FIDH et le centre des droits de l’Homme Mémorial ont mandaté une mission pour évaluer la situation des droits humains dans cette République et en particulier le phénomène de la torture (voir la note de situation publiée par la FIDH le 25 novembre 2005 « Elections parlementaires en Tchétchénie: Un climat de terreur »).
 
Cette mission a confirmé que, malgré la « normalisation » proclamée par Moscou et les autorités tchétchènes pro-russes, disparitions forcées, tortures, passages à tabac et mauvais traitements continuent d’être perpétrés en Tchétchénie en permanence. Le plus souvent, les proches des personnes disparues ou torturées préfèrent emprunter des circuits informels et payer pour « récupérer » ou « sécuriser » leur proches, plutôt que de passer par des voies légales incertaines. Ce non-recours au système légal contribue à alimenter le système de corruption et d’impunité.

Les avocats rencontrés par la mission ont également insisté sur les difficultés auxquels ils sont confrontés dans leur action de défense de leurs clients, et sur les risques auxquels ils sont eux-mêmes soumis.

De plus, non seulement la procuratura et les forces de l’ordre ne mènent pas de façon effective d’enquêtes sur les tortures et les traitements inhumains, mais ils cherchent en permanence à cacher ces actes et à en protéger les responsables. Les enquêtes criminelles – quand elles sont ouvertes – sont fermées très peu de temps après, les dossiers se perdent ou disparaissent, de même que disparaissent des preuves matérielles importantes (photos, expertises médicales, enregistrement vidéos, habits ensanglantés). Les témoins potentiels sont menacés. Il n’est pas rare que l’on propose aux personnes détenues, victimes de torture, ou a leur famille, de retirer leur plainte en échange d’un meilleur traitement pour le détenu.

La FIDH et la LDH rappellent également que, même si les différentes milices locales sont devenues les principales responsables des violations des droits de l’Homme, l’Etat russe est, selon la chaîne de commandement, responsable des agissements de ces milices, puisque ces dernières sont rattachées pour la plupart à des structures armées russes.

En outre la FIDH et la LDH souhaitent souligner que le conflit s’étend désormais à d’autres régions de la Russie, notamment sur l’ensemble du Caucase du Nord.

A l’occasion de vos prochaines rencontres avec Monsieur Poutine et ses représentants, la FIDH et la LDH vous appellent à utiliser toutes les moyens diplomatiques et politiques à votre disposition pour mettre fin à toutes les formes de harcèlement dirigées contre les ONG de défense des droits de l’Homme en Russie et à garantir pleinement la liberté d’association conformément aux instruments internationaux. Nous espérons au surplus que la France saura faire preuve d’une même détermination dans le cadre du processus des Consultation sur les droits de l’Homme entre l’Union Européenne et la Russie.

Nous vous demandons également d’aborder avec détermination la situation des droits de l’Homme en Tchétchénie et dans le Caucase du Nord dans son ensemble, en demandant aux autorités de faire cesser toutes formes de violence, y compris les attaques, mauvais traitements, disparitions forcées et exécutions sommaires à l’encontre de la population civile; de garantir le libre accès aux ONG et médias indépendants sur le territoire de la Tchétchénie, et de juger les auteurs des violations graves des droits de l’Homme perpétrées dans cette République.


Veuillez recevoir, Monsieur le Ministre, l’expression de notre plus haute considération.
   

Jean-Pierre Dubois
Président de la LDH

Sidiki Kaba
Président de la FIDH

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