27 septembre 2004 : Lettre adressée à Jacques Chirac, Président de la République, à l’occasion du 25 septembre “journée nationale d’hommage aux Harkis”

Monsieur Jacques Chirac

Président de la République

Palais de l’Elysée

 

 

Paris, le 18 septembre 2004

 

Monsieur le président,

 

Plus de quarante ans après la fin de la guerre d’Algérie, notre pays refuse d’assumer ses responsabilités à l’égard de ceux que l’on a communément l’habitude d’appeler les harkis.

 

Les anciens harkis membres des formations supplétives ont participé à ce conflit au nom de la République française. À l’issue de cette guerre, comme vous le savez, nombre d’entre eux ont été abandonnés sur ordres et ont subi, souvent avec leurs familles, un sort inhumain. Rien ne pouvait justifier qu’on laisse ces hommes et ces femmes à la merci d’une violence, insupportable mais largement prévisible, compte tenu des drames qui ont endeuillé cette guerre.

 

Ceux qui sont venus en France ont été victimes de discriminations inouïes. Parqués dans des camps, tenus à l’écart de leurs voisins immédiats, ils ont été condamnés à des emplois médiocres ou à l’assistanat pur et simple. Leurs enfants ont subi la même destinée, réduits à suivre une scolarité amputée. Rien ne peut justifier les discriminations dont ont été et sont encore victimes ceux qui ont servi la République et que leurs enfants subissent encore.

 

Vous avez su, Monsieur le président, reconnaître publiquement les responsabilités de la France lors d’autres heures sombres de notre histoire. Récemment la France a exprimé sa reconnaissance aux harkis. La vérité commande d’aller au delà.

 

Parmi les signataires de cette lettre, certains ont approuvé la lutte du peuple algérien pour son indépendance, d’autres non. Quelle qu’ait notre opinion, nous ne pouvons admettre que la République ne reconnaisse pas ses torts au regard des droits de l’Homme.

 

Nous vous demandons, Monsieur le président, de vous exprimer au nom de la République et de dire solennellement les responsabilités de celle-ci dans le sort tragique de ces Français.

 

Nous vous prions de croire, Monsieur le président de la République, à l’expression de notre haute considération.

 

Michel Tubiana, Président de la LDH

 

Mardi 28 septembre, une délégation composée de Michel Tubiana (président de la Ligue des droits de l’Homme), Mouloud Aounit (secrétaire général du Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples), Bernard Ravenel (président de l’Association France-Palestine-Solidarité) et Christian Picquet (coordinateur du Collectif national pour une paix juste et durable entre Palestiniens et Israéliens) a été reçue par l’ambassadeur d’Israël, Monsieur Nissim Zvili.

 

La délégation avait sollicité cette entrevue à la suite de la longue grève de la faim des prisonniers palestiniens, afin de protester contre les conditions inhumaines de détention de ces derniers, de demander le respect par l’Etat d’Israël de la IV° Convention de Genève, et d’exprimer son inquiétude sur l’isolement auquel est soumis le député palestinien Marwan Barghouti.

 

Elle a, sur tous ces points, remis à l’ambassadeur d’Israël une motion signée de plusieurs dizaines de responsables associatifs, syndicaux et politiques français.

 

Au cours de cet entretien franc et courtois, qui a duré plus d’une heure, l’ambassadeur a pris acte de ces demandes et rendu compte de la position des autorités israéliennes.

 

La délégation s’est félicitée d’avoir pu exposer à la représentation israélienne en France le sens de son action pour que le droit s’impose aux logiques de punitions collectives, de guerre et d’occupation. Elle a également dû constater qu’elle n’avait pas reçu de réponses à ses préoccupations et que la pression de l’opinion publique devait se poursuivre.

 

Les organisations au nom desquelles l’entrevue avait été demandée annonceront prochainement de nouvelles initiatives en ce sens.

 

Paris, le 30 septembre 2004

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