2000 – RAPPORT ANNUEL – La Ligue dans toutes ses sections

Ni palmarès, ni synthèse des informations publiées dans LDH Info, cette rubrique tente de refléter les images composites et conciliables, de ce que sont et de ce que font les sections. Par téléphone, par fax, par courrier électronique et postal, chaque semaine, des centaines de contacts relient les sections au siège, même si trop d’entre elles encore donnent seulement signe de vie par l’envoi des cotisations.

Les courriers : ce sont les comptes-rendus de réunions internes ou publiques ; les demandes d’intervention ; l’accord avec les positions nationales ou leur contestation ; des réflexions sur les dominantes 2000 de l’actualité, en France (les OGM, les prisons, les nouvelles procédures judiciaires, et toujours… les sans-papiers !), dans le monde (la Charte européenne, les libertés fondamentales de plus en plus menacées en Tunisie, la mondialisation, et toujours.. le conflit israélo-palestinien !), dans la Ligue (les modifications statutaires…) ; et, lapidaires ou développées, des récriminations sur les défaillances inévitables des services, parfois agrémentées d’une pointe d’humour… Le ton, les mille sujets abordés, révèlent la richesse des sections dans leur diversité, mais surtout l’attention critique portée à la visibilité, à la lucidité – ou non – des positions nationales de la LDH (ainsi du communiqué sur la nouvelle demande de libération de Patrick Henry ; ainsi de la participation, en octobre, à la manifestation de soutien aux Palestiniens où avaient scandaleusement fusé des propos antisémites), et la vigilance scrupuleuse des évènements et des discours nationaux ou locaux auxquels il faut réagir promptement. Chaque section en porte témoignage, dans son fonctionnement même par son ancrage dans la société civile ; par le souci  là où elle est implantée, d’être la « représentante » de la LDH ; par ses actes et par ses écrits.

Les sections sont diverses dans leur fonctionnement. Les réunions internes parfois (entre)ouvertes. Le rythme en est inégal : généralement mensuel, il s’accélère au quatrième trimestre avec la « rentrée » et, cette année, le renouvellement des bureaux avant les assemblées générales qui vont choisir les premiers comités régionaux. Réunions d’organisation et de gestion où l’on traite le prosaïque – ingrat et nécessaire – ; réunions de réflexion autour de thèmes préparés (la peine de mort, les langues régionales, les prisons…) ou d’une actualité plus immédiate (contre le PARE, sur la pilule du lendemain) ; réunions qui préparent à l’Université d’automne – donc autour du thème de la laïcité – ; réunions d’interrogations (quelle Ligue pour demain ? comment lutter contre les sectes ?) ; réunions de mobilisation avant une réunion publique ou une manifestation ; réunions de formation – le plus souvent d’ailleurs fédérales ou régionales – parfois destinées aux nouveaux arrivants. Ces nouveaux dont les comptes-rendus mentionnent rarement l’accueil, essentiel pour leur intégration, et qui évite les adhésions éphémères encore nombreuses cette année. Des formules sont à trouver qui relèvent d’une politique élaborée de recrutement. Les lieux de réunion sont divers. Toujours les mêmes, ou bien l’on va chez l’un, chez l’autre. Certaines sections – et c’est nouveau – décident de « tourner » dans le département ou dans le voisinage et de tenir réunion dans une commune où il n’y a pas de section, histoire de faire connaître la Ligue en invitant des sympathisant(e)s. De plus en plus, les sections, comme il leur a été demandé, ont une adresse publique, un numéro de téléphone inscrit dans les « pages jaunes » de l’annuaire et dont le répondeur est à l’écoute permanente de qui veut. Parfois la section a un local qu’elle partage, ou non, avec d’autres, dans une maison d’associations ou une maison des droits de l’homme.

Ainsi favorise-t-on la qualité du tissu associatif qui donne toute sa dimension à la section, comme par la présence de la section dans des instances communes permanentes ou temporaires (collectif de femmes, marche mondiale des femmes de l’an 2000, comité de vigilance contre la présence d’élus du Front national dans les CA des lycées, comité pour une autre organisation du commerce, coordination des collectifs « marée noire », collectif de vigilance pour une autre OMC, réseau citoyen contre l’extrême droite, etc. ). Certaines sections ont fondé ces structures (telle la création, par une section, d’une « chambre consulaire des associations »), ou en constituent l’élément moteur. Contrairement à ce qui se dit encore, l’autonomie est chère aux sections. Et notre conception de la démocratie n’a rien à perdre à de telles situations où nous assumons pleinement la fonction fédérative qui est dans la nature de la Ligue. La plupart des sections l’ont bien compris qui, en même temps, – c’est une condition impérative d’une telle démarche – veillent par leurs écrits ou par leurs déclarations à ne rien dévoyer de nos positions, et loin de s’isoler, multiplient les liaisons intersections : dans nombre de comptes-rendus, on trouve des informations sur les sections avoisinantes, sur la fédération, sur le comité régional qui va prendre avec les mois toute son importance. Certaines même ont l’heureuse idée de s’envoyer leurs listes respectives d’adhérent(e)s en vue d’invitations mutuelles et d’échanges réguliers. Les initiatives communes ne sont plus un phénomène rare. La mise en réseau entre dans la culture de la Ligue. Évidemment, le siège a toute sa place dans ce « maillage ». Il n’est ni anonyme ni abstrait : les ligueurs savent de mieux en mieux à qui s’adresser pour demander conseils, informations, appuis ; pour organiser avec « la com » une réunion publique où l’on fait appel à un membre du Bureau national ou du Comité central ; pour transmettre un dossier au service juridique avec lequel les sections qui tiennent –seules ou non – des permanences, entretiennent des relations constantes ; pour informer, suggérer, critiquer… Ces va et vient permanents permettent de franchir les passes délicates comme nous en trouvons chaque année sur notre route : aujourd’hui ce seront les rapports cahotants de certaines sections avec Attac, les premières réactions après les déclarations de Bigeard et de Massu sur la torture, les réactions passionnelles qu’entraînent les tensions au Moyen-Orient. Nous agissons alors, nous nous exprimons, dans le respect les uns des autres et avec la détermination de chercher ensemble ce qu’il est du devoir de la Ligue de dire et de faire. Le comportement de la majorité des sections en fait foi. La cohérence de nos actes avec nos orientations, la force des positions et des propositions de la Ligue sont à ce prix.

Elles dépendent aussi, évidemment, de cette capacité des sections à « représenter’ » – dans tous les sens du terme – la Ligue nationale au plan local :

  • en direction des pouvoirs et des établissements publics (préfectures, municipalités, inspections académiques, centres hospitaliers, commissariats de police…).
  • dans les structures de concertation (CODAC, qui fonctionnent plus ou moins, sombrent, par ci, par là dans le sommeil, avec lesquels les relations peuvent s’avérer difficiles, comme en témoignent les premiers rapports qui nous parviennent des sections ; missions locales d’insertion ; commissions de surveillance des prisons…), ou en partenariat, par exemple avec les centres sociaux.
  • dans les médias (radios, qui reçoivent certaines sections régulièrement, proposant à l’une d’entre elles une « fenêtre » mensuelle sur ses activités ; télévision ; périodiques dont on envoie les coupures à Paris…) ; par des conférences de presse, une invitation à un club de la presse, des communiqués sur l’actualité, (ainsi au moment des attentats antisémites), sur des actions de la Ligue, spécifiques ou collectives, sur ses structures à l’occasion d’une réunion de « rentrée », de l’élection d’un nouveau bureau, d’une initiative à annoncer, pour s’indigner de propos homophobes ou de la publication d’une bande dessinée douteuse de l’histoire de la Bretagne…
  • par des interventions en milieu scolaire (actions pour la citoyenneté avec les clubs Unesco, sur le racisme, sur l’histoire de la Ligue…), des rencontres avec des lycéens…
  • par les permanences d’accueil ou juridiques que tiennent de nombreuses sections, seules ou conjointement avec la Cimade, l’Asti,… qui étudient des dossiers individuels et préparent aussi les démarches auprès des pouvoirs publics
  • par notre présence, avec badges et banderoles, sur le lieu d’une manifestation, qu’on y prenne ou non la parole
  • par des stands dans des journées du livre, dans des forums d’associations, dans une fête interculturelles « Tissé-Métissé », par notre présence à l’inauguration d’expositions (sur les droits de l’enfant, par exemple ), dans des foires régionales, sur des marchés…

Et par toutes les initiatives de terrain de plus en plus nombreuses qui concernent de plus en plus de situations, dont les formes empruntent celles du défilé, du rassemblement silencieux, de la réunion publique ou du meeting, du film-débat, d’un festival de cinéma. Elles peuvent constituer des actes symboliques : dépôt de gerbe devant un monument à la mémoire de soldats fusillés pour l’exemple durant la guerre de 14-18, ou de 73000 soldats originaires de l’empire colonial tombés pour la France, inauguration d’une rue Hélène et Victor Basch, d’une place des droits de l’Homme, dénomination d’un cèdre du Liban « arbre des droits de l’Homme » ou d’un tulipier de Virginie « arbre des droits de l’enfant »…D’abord les initiatives qui constituent le relais des grandes campagnes nationales de la Ligue, en 2000 : contre la peine de mort (et particulièrement en faveur d’Odell Barnes et de Mumia Abu Jamal ; contre les discriminations ; pour le droit de vote et d’éligibilité des résidents étrangers non communautaires ; la préparation du centenaire de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association. D’autres sur des combats permanents (celui des sans-papiers : notre indignation contre la dernière circulaire Chevènement, l’accueil des sections aux marcheurs Toulouse-Paris ; celle de la dépénalisation des drogues « douces » ; la participation à des relogements ; le fichage médico-social ; la défense des droits de l’homme, en Algérie, en Tchétchénie, en Tunisie… notamment.

Ensuite, l’organisation annuelle du « cross de toutes les couleurs », du concours de poèmes pour la fraternité (dont la constitution des jurys, la remise des prix ,a permis, dans plusieurs sections, des contacts efficaces avec les jeunes, les parents , les enseignants), la participation rituelle à « la semaine contre le racisme », à la commémoration du 17 octobre 1961…

Puis des actions plus circonstancielles, où la Ligue s’engage par des communiqués et des appels à manifester à Paris (visite des présidents algérien et russe, par exemple) avec des répercussions ailleurs en France. Parfois, elles se trouvent décentralisées, faisant converger les ligueurs d’un peu partout, à Millau pour la Confédération paysanne, pour une autre Charte des droits fondamentaux à Nice.

Enfin les « ripostes » locales appelées, soit par les sections, soit par des collectifs spécifiques ou composés à l’instar des collectifs nationaux .Pour dénoncer « toutes les pollutions », le racisme ordinaire (sous forme d’inscriptions ou de comportements discriminatoires), les agissements inacceptables de policiers, le non respect de la présomption d’innocence. Pour protester contre des atteintes à la laïcité. Pour répondre à des articles de presse, pour participer de la solidarité avec les gens du voyage… A ces initiatives qui, par leur diversité, témoignent du caractère généraliste de la LIgue, s’en ajoutent d’autres qui constituent comme une célébration, parfois festive, de nos idéaux : banquet républicain, ou repas champêtre, kermesse, fête annuelle concert de « toutes les couleurs »…

Il y a des sections à qui ça ne suffit pas ! Ce n’est pas tant qu’elles veulent en « rajouter ». Elles consolident, confirment dans la durée l’action au quotidien jugée trop fugace. Outre les communiqués, les articles dans les journaux, des affiches sur les murs, les comptes-rendus aux adhérent(e)s et à Paris, elles « produisent » aussi :

  • un bulletin, interne ou non, distribué (une section commence par là et propose ensuite un abonnement aux lecteurs intéressés), ou vendu, diffusé plus ou moins régulièrement sur les marchés, à la gare, dans les boites aux lettres… Des fédérations le font aussi.
  • des documentations sur des thèmes de toute sorte, correspondant souvent aux axes des groupes de travail nationaux, brochures ou livrets sur l’histoire de la Ligue dans leur région, des rapports sur leur expérience des CODAC, sur une maison de justice ou simplement sur leur activité, le tout constituant un élément utile pour initier les « nouveaux », pour faire découvrir la Ligue aux autres…
  • des sections montent aussi des groupes de travail locaux, parfois en liaison avec ceux de Paris, pour approfondir un thème, préparer une réunion publique, ou faire mieux connaître la violation d’un de ces droits que la Ligue est censée défendre tous.
  • tandis que d’autres construisent des expositions (qui circulent, sont prêtées à d’autres sections), confectionnent des tee-shirts, etc.  

Sans oublier – mais c’est par là qu’il faut terminer – les sections de l’utopie (dans le sens généreux et optimiste du terme) ! En en citant une, exceptionnellement : la section de Pérouges qui aimerait peupler la « méridienne verte », de tilleuls de Pérouges, véritables clones du tilleul planté en 1792 par les Marseillais qui « montaient » à Paris. Telles sont beaucoup de sections de la Ligue. Telles ne sont pas toutes. Il appartient aux unes de contribuer à faire évoluer les autres ; il appartient aux ligueurs, un peu disponibles et géographiquement proches de ces sections en difficulté d’énergie, de contribuer à leur revitalisation. Dans plusieurs départements on s’y emploie, et certains des comités régionaux – dont c’est l’un des rôles – réfléchissent déjà à des modalités d’action. C’est une des formes de la solidarité intersections, indispensable à toute évolution. En outre, le maillage plus dense du « réseau LDH », les modifications statutaires, constituent aussi des atouts efficaces pour atteindre l’objectif d’une Ligue de sections militantes, plus dynamiques encore et encore plus près du terrain. Bref, la Ligue du XXIe siècle.

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