Communiqué commun dont la LDH est signataire
Le 19 juin 2025, devant le tribunal judiciaire de Châlons-en-Champagne, se tiendra le procès pénal de deux sociétés de prestation de services, de la gérante de l’une d’elles ainsi que deux autres personnes poursuivies pour traite des êtres humains, rémunération insuffisante, travail dissimulé, soumission de personnes vulnérables et dépendantes à des conditions de travail ou d’hébergement indignes, commis au cours des vendanges champenoises, entre le 8 et le 15 septembre 2023, à Nesle-le-Repons (51).
C’est lors d’une banale intervention pour nuisances sonores que les gendarmes de la Brigade de Dormans découvrent la présence de travailleurs étrangers logés dans des conditions extrêmement précaires et insalubres. Ces derniers rapportent travailler à un rythme excessivement intense, sans protection, avec très peu d’eau, en subissant des menaces, 10 heures par jour. Un deuxième contrôle s’effectue alors avec l’inspection du travail et 57 travailleurs, principalement originaires du Mali, du Sénégal et de Mauritanie sont finalement identifiés. Sans autorisation de travail pour une majorité d’entre eux et sans ressources, ils étaient en situation de grande vulnérabilité.
Sollicités par les services d’enquête, le Comité contre l’esclavage moderne (CCEM) et la CGT se sont mobilisés auprès des victimes, notamment afin d’assurer leur mise à l’abri et de leur permettre de se nourrir. Rejoints par la LDH (Ligue des droits de l’Homme), ils se portent ainsi parties civiles pour soutenir les victimes dans cette nouvelle affaire révélatrice des dérives pouvant survenir dans le monde agricole.
Le 14 septembre 2022 déjà, le tribunal de Reims condamnait à trois ans de prison dont un avec sursis un couple dirigeant une société de prestations viticoles dans le vignoble de Champagne – ainsi qu’à une amende de 100 000 € et à une interdiction de gérer pendant douze ans – pour, entre autres, des faits de traite des êtres humains aggravée. 125 victimes avaient été identifiées et 3 accompagnées par le CCEM et la CGT, également parties civiles. Ces affaires interrogent quant à la protection des travailleurs agricoles notamment étrangers en France, et aux risques engendrés par la sous-traitance, devenue structurelle. En 2024, 14% des victimes nouvellement identifiées par le CCEM ont été exploitées dans le monde agricole.
Signataires : Confédération générale du travail (CGT), Comité contre l’esclavage moderne (CCEM) , LDH (Ligue des droits de l’Homme)
Alors que cette affaire est donc loin d’être un cas isolé, la CGT tient à rappeler qu’elle met en lumière les pratiques inacceptables de plus en plus courantes d’un patronat agricole qui n’hésite pas à surexploiter les travailleurs pour accroitre ses profits.
À l’instar des mots d’ordres portés lors des initiatives des agriculteurs, qui n’hésitent pas à utiliser la violence pour réclamer la fin de toutes normes sociales et environnementales, les exploitations agricoles restent des zones de non droits.
Elle met aussi en lumière la politique délétère du gouvernement et du ministère de l’Intérieur envers les travailleurs étrangers avec ou sans titres de séjour.
Alors que la loi permet aux victimes de traite d’avoir un titre de séjour pour sortir de leur situation de vulnérabilité, pour ces travailleurs, depuis septembre 2023 la réalité est toute autre. Le ministère de l’intérieur et ses services se désengagent, laissant ces salariés vulnérables, les renvoyant à la débrouille et dans une précarité extrême.
Ces travailleurs qui ont connu l’horreur ont subi de grandes difficultés pour obtenir un accueil en préfecture, attendent encore le renouvellement de leurs titres de séjour et se sont vu entravé pour déposer plainte contre leurs bourreaux.
Le 19 juin nous exigerons la condamnation de la société de service ainsi que les donneurs d’ordre pour leurs actes ignobles. Les vendangeurs victimes de traites d’êtres humains doivent être rétablit dans leurs droits. Loin de courber l’échine, ils seront là, debout pour réclamer justice.
Paris, 17 juin 2025
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