Renoncer une fois pour toutes à l’accord UE-Mercosur !

Lettre ouverte de la société civile adressée à la Commission européenne, endossée par 40 organisations européennes dont la LDH

Nous, organisations européennes soussignées, organisations paysannes, de travailleurs, de défense de l’environnement, des droits humains et du bien-être animal, nous vous appelons
instamment à mettre un terme définitif aux négociations relatives à l’accord de libre-échange entre l’Union européenne et le Mercosur.
Alors que les agriculteurs manifestent dans toute l’Europe, nous déplorons que la Commission européenne continue de faire pression pour ratifier un accord qui va générer une concurrence déloyale entre agriculteurs européens et sud-américains. Les agriculteurs ne pourront survivre à long terme qu’en obtenant des prix justes et stables pour des produits plus respectueux de l’environnement et du bien-être animal. Pour y parvenir et garantir la souveraineté alimentaire, les règles commerciales multilatérales et la politique agricole commune doivent être modifiées en profondeur. Mettre fin à l’accord UE-Mercosur est une excellente occasion de mettre des alternatives sur la table. L’une des principales revendications des manifestations d’agriculteurs à travers l’Europe est de mettre fin à cet accord. Les accords de libre-échange ont conduit à la déréglementation des marchés, la précarité de l’emploi et de faibles revenus pour les agriculteurs. Des années de politiques néolibérales ont affaibli et causé la disparition de milliers de petits paysans et d’un approvisionnement alimentaire local. Nous soutenons la demande des agriculteurs de mettre fin, définitivement, aux négociations portant sur cet accord obsolète entre l’UE et le Mercosur.
L’accord de libre-échange UE-Mercosur constitue une grave menace pour les personnes, les animaux et la planète. Comme le montrent plusieurs études, dont l’étude d’impact menée par la Commission européenne elle-même, l’accord de libre-échange, au lieu de lutter contre l’urgence climatique, va l’aggraver. L’accord place les intérêts économiques au-dessus de notre bien-être commun.
L’accord soulève des problèmes intrinsèques qui ne peuvent être résolus par un instrument conjoint ou additionnel. En effet, même doté de l’instrument conjoint proposé, cet accord va
renforcer l’intensification des monocultures, de l’élevage et des modèles d’extraction en encourageant des investissements plus néfastes dans ces secteurs. La demande européenne en faveur de l’importation de ressources tels que le soja, le bœuf, l’éthanol (basé sur la canne à sucre) et la volaille, fera également croître les risques de déforestation et de violation des droits humains, et cet accord favorisera la désindustrialisation et les inégalités sociales insoutenables en Amérique du Sud.
L’accord UE-Mercosur va bénéficier à l’exportation de ressources qui ne sont pas couvertes par le règlement européen sur la déforestation et il amplifiera la destruction d’écosystèmes précieux qui sont, pour l’instant, également exclus du règlement. D’ores et déjà, les biomes d’Amérique du Sud sont en grand danger, au-delà de l’Amazonie : par exemple, en 2023, la déforestation dans le Cerrado brésilien a augmenté de près de 45 %. Cet accord ne ferait qu’aggraver la situation. En outre, il ferait reculer la lutte pour la protection de la santé publique et de l’environnement. L’accord va libéraliser l’exportation vers les pays du Mercosur de pesticides interdits dans l’UE en raison de leur toxicité et de la menace qu’ils représentent pour la santé publique. Ces substances dangereuses reviennent de plus dans l’UE par le biais des importations de denrées alimentaires. L’accord serait également un désastre pour la lutte contre la pollution plastique, car il rendrait le commerce des produits plastiques à usage unique encore plus attrayant, alors que l’UE a adopté une interdiction interne de certains plastiques à usage unique.
Les négociations autour de l’accord de libre-échange UE-Mercosur n’ont pas non plus la légitimité nécessaire pour aller de l’avant. Il est très préoccupant qu’après l’élection de Javier Milei à la présidence de l’Argentine, un libertaire d’extrême droite qui a nié l’existence du changement climatique d’origine humaine, et qu’à l’approche des élections européennes, la Commission se précipite pour conclure un accord à l’abri de l’examen du public et du Parlement européen. L’absence de débat démocratique et de transparence autour des négociations de cet instrument commun actuellement négocié porte atteinte à la légitimité de l’UE et risque d’affaiblir la capacité des parlements européens et nationaux à débattre de manière approfondie des conséquences de l’accord commercial.
Après près de 25 ans de négociations, il est clair pour nous tous que cet accord UE-Mercosur est totalement et irrémédiablement dépassé. Nous vous appelons instamment à écouter les agriculteurs, les citoyens et la société civile organisée et à renoncer une fois pour toutes à cet accord toxique.
Nous vous prions d’agréer, Madame la Présidente, l’expression de nos sincères salutations

Nom des organisations signataires :
AItec
Eurogroup for Animals
PowerShift e.V., Germany
Friends of the Earth Europe
Anders-handeln
Entraide et Fraternite
TROCA – Plataforma por um Comercio Internacional Justo European Coordination of La Via
Campesina (ECVC) European Trade Justice Coalition (ETJC)
Veblen Institute for economic reforms
Ecologistas en Accion Entrepueblos/Entrepobles/Entrepobos/Herriarte
ATTAC Espana
Handel Anders!, Netherlands
Framtidsjorden, Sweden
Agriculture coalition for Just Trade, Netherlands
Platform Aarde Boer Consument, Netherlands
Fern
Feedback Europe, Netherlands
WIDE+
foodwatch International
ASTM Luxembourg
Federation Artisans du Monde
Foodwatch
Attac France
Generations Futures
France Nature Environnement
Amis de la Terre France
ReAct Transnational (France)
FSU
Collectif national Stop Mercosur
ActionAid France
LDH (Ligue des droits de l’Homme)
Alternatiba
Action non-violente COP21
Netzwerk gerechter Welthandel
Umweltinstitut Munchen e.V.
GADIP, Sweden
Fair Trade Advocacy Office
Comite Pauvrete et Politique
Bloom
Climate Action Network Europe (CAN Europe)

Bruxelles, le 20 février 2024

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