Cadre légal : quand une garde à vue est-elle possible et pour quelle durée ?

Une personne ne peut être mise en garde à vue que s’il existe plusieurs raisons plausibles de penser qu’elle a commis ou tenté de commettre un crime ou un délit puni d’une peine d’emprisonnement.

La garde à vue n’est donc pas possible pour une personne ayant commis une contravention, comme par exemple la participation à une manifestation interdite.

 

Pour quels motifs pouvez-vous être placé en garde à vue ?

La garde à vue doit être le seul moyen pour les enquêteurs de la police judiciaire de parvenir à l’un des objectifs suivants[1] :

  • permettre l’exécution des investigations impliquant votre présence ou votre participation aux faits reprochés ;
  • garantir votre présentation devant le procureur de la République afin qu’il puisse apprécier la suite à donner à l’enquête ;
  • empêcher que vous modifiez les preuves ou les indices matériels ;
  • empêcher que vous fassiez pression sur les témoins ou les victimes ainsi que sur leur famille ou sur leurs proches ;
  • empêcher que vous ne vous concertiez avec d’autres personnes qui seraient vos coauteurs ou vos complices
  • garantir la mise en œuvre des mesures destinées à faire cesser le crime ou le délit.

Attention ! On assiste désormais à des détournements de procédure. A titre d’exemple, le fait de disposer d’un masque de protection en manifestation a pu amener des policiers de police judiciaire à placer en garde à vue des personnes, alors même qu’aucune infraction ne peut réellement être retenue contre elles. La qualification retenue est souvent celle de la participation volontaire à un groupement dans le but de commettre des dégradations. La garde à vue est alors employée dans un but préventif, ce qui constitue un dévoiement du code de procédure pénale. Il reviendra à votre avocat de le faire valoir.

 

Quand commence votre garde à vue ?

L’officier de police judiciaire doit immédiatement vous informer de votre placement en garde à vue, des motifs le justifiant, de la qualification des faits qui vous sont reprochés et de vos droits[2]. Il doit également informer, dès le début de la garde à vue, le procureur de la République ou le juge d’instruction.

La garde à vue commence au moment où vous êtes appréhendé par les forces de police.

Dans certains cas, la garde à vue peut commencer au moment où vous êtes conduit dans les locaux de police ou de gendarmerie, si le placement en garde à vue n’a pas pu être notifié clairement sur la voie publique[3]. Néanmoins, dans ce cas, le moment entre l’interpellation par les forces de police et la conduite au commissariat ne doit pas dépasser environ 30 minutes.

Passé ce délai, la garde à vue sera considérée comme irrégulière[4].

 

Combien de temps peut durer la garde à vue ?

La durée de la garde à vue est de 24 heures.

Le procureur de la République peut prolonger la durée de la garde à vue de 24 heures supplémentaires, si et seulement si les deux conditions suivantes sont réunies :

  • l’infraction que vous êtes soupçonné d’avoir commis ou tenté de commettre est un crime ou un délit puni d’une peine d’emprisonnement supérieure ou égale à 1 an ;
  • la prolongation de la garde à vue est le seul moyen de parvenir à l’un des objectifs justifiant la garde à vue[5] ou de permettre votre présentation devant l’autorité judiciaire[6].

A titre exceptionnel, la durée totale de la garde à vue peut être portée jusqu’à 96 heures, si vous êtes soupçonné d’avoir commis ou tenté de commettre le crime de destruction, de dégradation et de détérioration d’un bien commis en bande organisée par l’effet d’une substance explosive, d’un incendie ou de tout autre moyen de nature à créer un danger pour les personnes[7].

 

Le procès-verbal en garde à vue

Dès lors que vous êtes placé en garde à vue, l’officier de police judiciaire doit établir un procès-verbal[8] qui mentionne :

– les motifs qui justifient le placement en garde à vue ;

– la durée de vos auditions et des repos qui ont séparé ces audiences, les heures auxquelles vous avez pu vous alimenter ;

– le jour et l’heure à partir desquels vous avez été en garde à vue, ainsi que le jour et l’heure à partir desquels vous avez été libéré, soit déféré devant le juge compétent (procureur de la République ou juge d’instruction) ;

– vos auditions effectuées éventuellement dans une autre procédure pendant la durée de la garde à vue ;

– les informations données, les questions posées et les suites qui leur ont été données ;

– s’il a été procédé à une fouille intégrale ou à des investigations corporelles internes.

Vous devez émarger ces mentions. Si vous refusez d’émerger[9], cela sera mentionné dans le procès-verbal.

Attention ! Relisez impérativement votre procès-verbal. Si les mentions qui figurent au procès-verbal ne sont pas exactes, notamment l’heure de début de la garde à vue, vous pouvez refuser de le signer. Vous devez avertir votre avocat de l’irrégularité de ces mentions. En effet, si vous êtes poursuivi, votre avocat pourra soulever la nullité de la garde à vue, si l’une des formalités[10] ou des garanties entourant la garde à vue[11] n’est pas respectée, et que leur méconnaissance porte atteinte à vos intérêts.

 

[1] Article 62-2 du Code de procédure pénale
[2] Article 63-1 du Code de procédure pénale
[3] Cass. crim. 23 mars 1999, D. 1999. Somm. 324, obs. Pradel
[4] Cass. crim., 24 mai 2016 n°16-80.564
[5] Article 63-2 du Code de procédure pénale
[6] Article 63 du Code de procédure pénale
[7] Article 706-73 du Code de procédure pénale, pour la liste complète des infractions susceptibles de prolonger la garde à vue. En matière de terrorisme, la garde à vue peut aller jusqu’à 6 jours
[8] Article 64 du Code de procédure pénale 
[9] Chacun des feuillets doit être signé
[10] Article 171 du Code de procédure pénale «formalités substantielles » et 802 du Code de procédure pénale
[11] Voir supra Quels sont vos droits en garde à vue ?
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