Lettre à Madame Nicole Ameline, ministre déléguée à la Parité et à l’égalité professionnelle

Madame la Ministre,

La LDH a eu connaissance de la nouvelle composition du Conseil Supérieur de l’Information Sexuelle, de la Régulation des Naissances et de l’Éducation Familiale (CSIS) : l’arrêté du 29 juillet 2002, paru au JO du 6 août 2002, modifie en effet la liste des associations membres de cette instance, écartant deux d’entre elles, la CADAC, Coordination des Associations pour le Droit à l’Avortement et la Contraception et l’ APGL, Association des Parents Gays et Lesbiens d’une représentation délibérative ; leurs représentantes ne siègeront désormais qu’en tant que ’personnes qualifiées’ ne disposant plus que d’une « voix consultative ».

Deux autres associations, en revanche sont intégrées: la Confédération Nationale des Associations Familiales Catholiques et la Fédération Nationale des familles de France.

Cette décision est injustifiée et inacceptable.

Le Conseil Supérieur de l’Information Sexuelle est défini comme « un lieu original de rencontre et d’échanges réguliers entre le milieu associatif proche des préoccupations de terrain et l’administration, un lieu dans lequel l’apport réciproque d’informations, l’expression de sensibilités plurielles, de savoir-faire et d’expertises permettent d’élaborer une réflexion et constituent une force de propositions auprès des pouvoirs publics ».(définition extraite du document de présentation du CSIS).

Or, la décision prise nous semble en contradiction patente avec la vocation explicite du CSIS, en déniant une place d’interlocuteur auprès des pouvoirs publics à deux associations, reconnues pour le rôle qu’elles ont joué dans l’avancée démocratique de la société vers l’extension des droits et des libertés et le recul des exclusions discriminatoires :

– la CADAC, coordination féministe a en effet œuvré contre les entraves faites à l’application de la loi sur l’IVG, contribuant à l’adoption de la loi Neïertz sur le délit d’entrave à l’IVG et plus récemment à la promulgation de la loi du 4 juillet 2001 relative à l’amélioration de l’accès à la contraception et à l’avortement. Elle a vocation déclarée à porter l’aspiration de la plupart des femmes à disposer librement de leur corps, à promouvoir les moyens d’une maternité responsable, à faire avancer l’égalité entre les hommes et les femmes et le droit pour les uns et les autres au libre choix de leur sexualité.

– L’APGL, justement admise dans une instance représentant les familles, était porteuse de la reconnaissance par le gouvernement de la réalité sociale présente de l’homoparentalité et de la responsabilité des parents gays et lesbiens. Sa présence au sein du CSIS était l’expression d’une volonté d’ouverture démocratique constructive et d’un refus d’exclure un groupe social encore trop discriminé d’une instance de citoyenneté.

La LDH s’inquiète de cette décision qui favorise les modèles traditionnels de société. Elle insiste sur le fait que toutes les opinions et les sensibilités doivent pouvoir s’exprimer. Ce choix est d’autant plus choquant qu’il porte sur des associations dont la sensibilité était déjà représentée au sein de ce Conseil.

Je veux croire, Madame la Ministre, que vous rapporterez cette mesure. A défaut, nous serions amenés à penser que votre décision relève d’un choix idéologique et partisan.

Vous comprendrez que je rende cette lettre publique.

Je vous prie de croire, Madame la Ministre, en l’assurance de ma haute considération.

Michel Tubiana

Paris, le 18 septembre 2002

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