Arrivée du président Bush en France

Lettre ouverte aux autorités françaises de la FIDH et la LDH

La Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) et son affiliée française la Ligue des droits de l’Homme (LDH) interpellent le président de la République et le gouvernement français dans la perspective de la visite imminente du président Bush en France.

1. Sur la lutte contre le terrorisme et l’abolition de la peine de mort

La FIDH et la LDH rappellent que les mesures exceptionnelles prises par le gouvernement américain dans le cadre de la lutte contre le terrorisme doivent être strictement encadrées dans les limites prévues par le droit international pour garantir le respect des principes fondamentaux de la personne humaine.

La FIDH et la LDH demandent au gouvernement français :

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de faire pression sur le gouvernement américain pour que les immigrés soupçonnés d’entretenir des connexions terroristes, arrêtés et interrogés par les policiers du FBI (Federal Bureau of Investigation) dans le cadre d’une détention arbitraire bénéficient des normes internationales garantissant notamment le droit à un procès équitable ;
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que les États-Unis reconnaissent le statut de prisonnier de guerre aux prisonniers de Guantanamo Bay. Et en tout état de cause que le gouvernement applique la décision du 13 mars 2001 de la Commission interaméricaine des droits de l’Homme qui l’enjoint de qualifier le statut des prisonniers de Guantanamo Bay à la lumière des Conventions de Genève de 1949 ;
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de réaffirmer l’engagement de la France pour l’abolition universelle de la peine de mort ;
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dans ce contexte, d’exiger que le présumé terroriste franco-marocain Moussaoui ne soit, dans l’éventualité d’une condamnation, soumis à la peine capitale ; et, en l’absence de garanties des États-Unis à cette fin, de geler toute coopération judiciaire bilatérale et européenne en pareil.

2. Sur la Cour pénale internationale

La FIDH et la LDH partagent et soutiennent les vives préoccupations exprimées par l’Union européenne le 13 mai 2002 sur les dernières initiatives prises par les États-Unis à l’encontre de la future Cour pénale internationale (CPI). Elles rappellent que l’Union européenne à fermement condamné les récentes déclarations du gouvernement Bush à l’égard de la CPI en les qualifiant, à la fois d’injustifiée et de dangereuses pour la poursuite effective des auteurs des crimes les plus grave.

La FIDH et la LDH demandent au gouvernement français :

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de maintenir une position ferme au niveau national et au sein de l’Union européenne en vue de l’établissement et de la mise en place de la CPI dans les conditions d’efficacité et d’indépendance que prévoit son statut et de poursuivre ses efforts pour convaincre les Etats qui ne l’ont pas encore fait de ratifier le Statut de la Cour ;
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de faire pression sur les États-Unis et sur l’ensemble des membres du Conseil de sécurité pour qu’ils refusent de conclure tout accord international susceptible de faire obstacle à la remise d’une personne à la Cour ; en particulier toute disposition visant à exclure de la compétence de la CPI les nationaux des contingents d’opérations de maintien de la paix des Nations unies ;
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d’insister auprès du gouvernement américain sur l’intérêt à long terme que représente pour tous les Etats la création d’une Cour pénale internationale indépendante et efficace et de l’inciter à renoncer à son opposition actuelle ;
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d’obtenir du gouvernement américain qu’il reviennent sur ses positions radicales et qu’au minimum il s’engage à ne pas paralyser l’exercice de la justice internationale.

Paris le 24 mai 2002

Complément d’information – Retour sur la position américaine vis à vis de la CPI

Signature, dé-signature, opposition active…

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Le 17 juillet 1998 à Rome, les États-Unis sont l’un des 7 Etats a voter contre le statut adopté par un vote favorable de 120 nations.
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Le 31 décembre 2000, Bill Clinton décide, in extremis d’apposer la signature de l’État américain sur le statut de la CPI.
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Le 28 mars 2002, l’ambassadeur chargé des questions de crimes de guerre avertissait que son gouvernement étudiait avec attention un possible retrait du statut de Rome.
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Le 6 mai 2002, Marc Grossman, sous-secrétaire d’État américain déclare que « le président Bush est arrivé à la conclusion que les États-Unis ne pouvaient pas être partie plus longtemps à ce processus. Afin que nos positions soient claires, à la fois dans le principe et dans la philosophie, et afin de ne pas créer de faux espoirs concernant l’engagement des États-Unis dans la Cour, le président estime qu’il n’a pas d’autre choix que d’informer les Nations unies, en tant que dépositaires du Traité, de notre intention de ne pas devenir partie du Statut de Rome de la Cour pénale internationale ».

Une loi ouvertement anti-CPI devant le Parlement américain

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Les 8 et 9 mai 2001 respectivement devant la Chambre et le Sénat, une loi « American Service member Protection Act » (ASPA) est présentée. En substance cette loi interdirait toute coopération américaine avec la CPI, interdirait toute assistance militaire avec la plupart des Etats ayant ratifié le Statut de Rome (sauf avec les membres de l’OTAN et ses alliés essentiels), restreindrait la transmission d’information relevant de la sécurité nationale aux pays ayant ratifié le Statut de la CPI, s’opposerait à la participation américaine aux opérations de maintien de la paix de l’ONU et autoriserait le président à utiliser « tous les moyens nécessaires et appropriés » pour libérer un citoyen américain détenu par la CPI.
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Pendant l’été 2001 et jusqu’aux événements du 11 septembre, les parlementaires à l’origine de la loi décident de lier l’autorisation du Sénat sur le paiement des arriérés américains à l’ONU à la loi anti-CPI.
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Le 10 septembre, la loi anti-CPI est révisée pour inclure des prérogatives présidentielles permettant de lever certaines des interdictions prévues par la loi ASPA.
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Le 13 septembre, deux jours après les attentats terroristes sur New York et Washington, le député Tom Delay décide finalement de renoncer à s’opposer au paiement des arriérés dû par les États-Unis et les députés acceptent donc le paiement sans le conditionner à l’adoption de la loi ASPA.
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Le 25 septembre, une lettre du département d’état informe Jesse Helms du soutien du gouvernement à la loi révisée.
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Le 28 novembre 2001, la loi ASPA prend du terrain. Le président Bush signe la loi de finance 2002 qui contient l’amendement Craig (section 630) interdisant l’utilisation des fonds affectés à la coopération, l’assistance ou tout autre soutien à la CPI ou à sa commission préparatoire. La signature est accompagnée d’une déclaration qui démontre que Bush entend interpréter l’amendement Craig comme n’interdisant pas les États-Unis à participer aux sessions de négociation de la commission préparatoire sur la CPI.
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Le 9 mai 2002, Tom DeLay (R-TX) re-introduit l’ASPA en tant qu’amendement à la loi supplémentaire de finance 2002. Cette version de la loi est moins virulente que celle acceptée par l’administration Bush en septembre 2001 mais l’essence de la loi demeure la même. L’amendement fut adopté par un vote 38 contre 18. Pour éviter que l’ASPA passe devant le Sénat, ce dernier doit refuser qu’un amendement soit attaché à la loi de finance. Un autre amendement ASPA est devant la commission mixte de la Chambre et du Sénat qui étudie à l’heure actuelle la loi sur les relations étrangères (H.R. 1646 State Department Authorization Act). Cette version est celle acceptée par l’administration Bush en septembre 2001.

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