Communiqué LDH
La LDH (Ligue des droits de l’Homme) a appris avec consternation la décision de l’administrateur du Collège de France d’annuler le colloque intitulé « La Palestine et l’Europe : poids du passé et dynamiques contemporaines », prévu les 13 et 14 novembre 2025. Il était co-organisé par l’historien Henry Laurens, titulaire de la chaire Histoire du monde arabe du Collège de France et le Centre arabe de recherches et d’études politiques (Carep).
Après avoir proposé aux organisateurs un événement à huis clos, l’administrateur a finalement décidé de l’annuler suite à une polémique, en invoquant la sécurité des biens et des personnes et le besoin de sérénité des débats. Cette décision interroge sur l’exercice de la liberté académique et la nécessaire diffusion auprès des citoyens du travail scientifique.
Notre préoccupation est d’autant plus forte que le ministre de l’Enseignement supérieur, Philippe Baptiste, s’autorise à porter un jugement sur le programme de l’évènement en approuvant l’annulation au motif que le colloque contreviendrait à la liberté académique du fait qu’il ne serait pas apte, à son sens, d’assurer un débat libre, respectueux et pluriel.
Le débat académique n’a pas lieu d’être neutre. S’il se doit d’être pluraliste, cela n’implique nullement que chaque table ronde, chaque panel, chaque colloque doive refléter la totalité de la diversité des approches et points de vue – ce qui irait à l’encontre d’approfondissement pour des approches particulières. La présence d’acteurs ou de témoins est une pratique courante dans le cadre de colloques et de débats, et la sollicitation en l’occurrence de Dominique de Villepin et Francesca Albanese, rapporteure spéciale de l’ONU pour les Territoires palestiniens, n’était pas de nature à entacher le caractère scientifique du colloque prévu.
Les modes de mise en cause et les motifs invoqués laissent présumer que le débat scientifique, même dans l’enceinte du Collège de France, devient vulnérable face à des pressions extérieures ou à des intimidations, en instrumentalisant l’argument de la sécurité. De nombreux sujets d’histoire, de sociologie, d’économie, de philosophie peuvent être considérés comme sensibles : ce motif ne peut suffire à justifier de graves entraves aux libertés académiques.
La LDH tient à rappeler le rôle central de la liberté de la recherche pour nos démocraties et de son expression au service de la connaissance. Une institution comme le Collège de France, forte de sa tradition, doit être exemplaire dans la protection du débat scientifique. Particulièrement sur des sujets sensibles. Les chercheurs doivent pouvoir librement, indépendamment de toutes pressions directes ou indirectes, organiser des événements scientifiques sur le thème, sous le format et les modalités qui leur paraissent appropriés.
La LDH, avec la FSU et le SNESUP-FSU, a déposé un référé-liberté contre la décision d’annulation de ce colloque devant le tribunal administratif de Paris.
Paris, le 11 novembre 2025
