28 avril 2004 : Action Directe : la loi, la justice et la vengeance

Déclaration du Président de la LDH au sujet d’Action Directe.

Ils sont cinq à être détenus pour avoir commis des assassinats et d’autres crimes. Le fait qu’ils les aient commis pour un motif politique ne rend pas plus acceptable leurs actes. Les détenus d’Action Directe ont semé une violence que rien ne peut justifier. Ils ont été jugés et condamnés pour cela : à perpétuité.

L’un d’entre eux, Régis Schleicher, est détenu depuis 21 ans. Il est libérable mais ses demandes de libération conditionnelle se heurtent à une permanente fin de non recevoir. L’esprit de Georges Cipriani tangue entre les murs des hôpitaux psychiatriques et ceux des prisons. Depuis longtemps, Georges Cipriani a perdu jusqu’au sens du temps, des lieux et de la peine qu’il purge. Nathalie Ménigon, atteinte par deux accidents cérébraux-vasculaires, pratique l’auto-mutiliation et son état mental comme physique fait qu’elle se traîne plutôt qu’elle ne vit. On vient de la maintenir dans cet univers. Joëlle Aubron et Jean-Marc Rouillan sont atteints d’un cancer. Tous ont subi des conditions de détention que l’administration pénitentiaire réserve aux rebelles et à ceux qu’elle a désignés comme l’objet de toutes ses peurs : isolement, surveillance accrue, visites réduites, etc.

Que signifie le maintien en détention de ces ombres ? Certes, des lois existent : elles permettent de mettre en liberté conditionnelle un condamné ou de suspendre l’exécution d’une peine afin de mieux soigner ou parce que le pronostic vital est irrémédiablement compromis. Mais comment penser que ces lois sont normalement appliquées, non seulement dans leur lettre mais aussi dans leur esprit, à ceux et à celles qui ont autant défié la société ? Pourtant, la force d’une démocratie réside dans sa volonté de ne pas réserver de traitement d’exception, fût-ce à des faits exceptionnels. C’est de ramener chacun à l’aune de la règle commune. Plus de 20 ans après les faits, il est temps de reconnaître à ces hommes et à ces femmes le bénéfice de l’égalité devant la loi. À défaut la justice qui les a condamnés se transforme en vengeance.

Michel TUBIANA

Président de la LDH

Paris, le 28 avril 2004

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