Lettre ouverte de l’Observatoire de la liberté de création dont la LDH est membre, adressée à David Lisnar, maire de Cannes
Monsieur le Maire,
L’Observatoire de la liberté de création tient à vous faire part de sa vive préoccupation à la suite de votre intervention publique relative à la programmation du film Put your hand and walk de Sepideh Frasi au cinéma l’Olympia.
Même si le programmateur, Cédric Perez, a déclaré n’avoir subi aucune pression directe, vos prises de position ont créé un climat d’intimidation qui n’est certainement pas étranger à la déprogrammation temporaire.
Le fait que le film ait été finalement reprogrammé à une date ultérieure ne saurait masquer qu’une atteinte symbolique à la liberté de programmation a eu lieu.
La liberté de programmation est un principe fondamental, garanti par la loi du 7 juillet 2016 relative à la liberté de création. Nous vous rappelons que le film disposant d’un visa, sa présentation est autorisée sur tout le territoire hors certains circonstances locales exceptionnelles dont il n’est pas justifié en l’espèce . Aucun élu de la République ne saurait s’arroger le droit d’intervenir dans le choix des œuvres diffusées sur son territoire. Le rôle d’un maire n’est pas de juger du contenu des films, mais de garantir aux artistes et aux spectateurs un espace de liberté, d’expression et de débat.
Nous nous étonnons particulièrement qu’une telle pression symbolique puisse s’exercer dans une ville qui, par sa proximité avec le festival de Cannes et son rayonnement culturel, incarne dans le monde entier la liberté de création et la diversité des regards portés sur les réalités contemporaines.
Le Festival de Cannes, qui accueille chaque année des œuvres venues de tous les horizons, aborde sans détour les sujets les plus sensibles. C’est cette ouverture qui fait la force et la fierté de notre paysage cinématographique.
Il est d’autant plus préoccupant qu’un film évoquant la situation dramatique du peuple palestinien puisse faire l’objet d’une telle controverse locale. La liberté artistique implique la possibilité d’aborder les réalités du monde, même lorsqu’elles dérangent. Les arguments politiques ou émotionnels ne sauraient justifier une entrave à la diffusion d’une œuvre.
Nous vous demandons instamment de réaffirmer publiquement votre attachement à la liberté de création et à l’indépendance des programmateurs culturels, et de veiller à ce que de tels épisodes ne se reproduisent pas.
L’Observatoire de la liberté de création restera attentif à la suite donnée à cette affaire, convaincu que le respect de la liberté artistique est indissociable des valeurs démocratiques que représente la République. Vous comprendrez que nous rendions cette lettre publique étant donné son sujet et son enjeu.
Veuillez croire, Monsieur le Maire, à l’assurance de notre considération distinguée.
Agnès Tricoire, présidente de l’Observatoire de la liberté de création
Paris, le 21 novembre 2025
Retrouvez cette lettre ouverte sur le site de l’Observatoire de la liberté de création.
