La LDH soutient le film “Difret”, de Zeresenay Berhane Mehari

Sortie le 8 juillet 2015

Prix du public à Sundance et Berlin Panorama, Prix du jury à Valenciennes

 

Une jeune fille de 14 ans, Hirut, vivant avec ses parents, des fermiers à la vie rude, dans un village situé à 300 km de la capitale Addis Abeba, est kidnappée à la sortie de l’école par une bande de jeunes hommes à cheval. L’un d’entre eux, âgé de 29 ans, a porté son dévolu sur elle et veut en faire sa femme. Comme l’encourage une tradition ancestrale, cet homme enlève Hirut, la séquestre et la viole. Mais elle réussit à s’échapper et tue son agresseur lors de sa fuite. Accusée de meurtre, elle encourt la peine capitale. C’est alors que Maeza Ashenafi, alertée par une autre avocate locale, prend l’affaire en main. Avec son engagement au sein de l’Association des avocates éthiopiennes qui apporte une aide juridique aux femmes maltraitées, elle se lance avec hardiesse dans un combat qui l’amène à défier l’autorité civile et le respect du droit coutumier. Au risque de tout perdre, l’avocate n’hésite pas un instant à livrer bataille malgré les pressions sociales, les intimidations et les menaces. Au péril de sa vie, elle va devoir se battre contre les préjugés et les traditions de la société éthiopienne, une société patriarcale dans laquelle les femmes n’ont que très peu de droits, pour réussir à faire innocenter Hirut lors d’un procès qui a pris une ampleur nationale.

Inspiré d’une histoire vraie qui secoua l’Ethiopie en 1996, Difret est le premier long-métrage du réalisateur éthiopien Zeresenay Berhane Mehari, émigré aux Etats-Unis. Ce récit d’un combat ouvre les yeux sur un pays et des coutumes méconnues, concernant des milliers de femmes éthiopiennes, et qui a conduit le gouvernement à rendre illégaux et passibles d’emprisonnement les enlèvements prénuptiaux : en 2004, une modification du Code pénal éthiopien a interdit ces pratiques et permet de condamner à cinq ans de prison leur auteur. Aujourd’hui, bien qu’en nette régression, elles n’ont pourtant pas totalement disparu.

Zeresenay Berhane Mehari nous livre un portrait très juste et non manichéen d’une société éthiopienne en pleine mutation, qui tente d’allier modernité et traditions. Pour cela, il a traité avec respect les différents points de vue. Une belle scène du film reconstitue un conseil de village où les hommes décident de leur justice sous un chêne. Et l’on constate que différents points de vue peuvent s’exprimer.

A défaut de grand cinéma, Difret développe avec subtilité et pudeur son sujet. C’est incontestablement une œuvre dont le point de vue féministe éclate avec force et sincérité. Le cinéaste a tenu par ailleurs à ce que son film soit entièrement éthiopien. Il a refusé toutes les propositions de productions américaines et européennes qui lui imposaient des stars pour tenir les rôles principaux, afin de tourner dans des décors naturels en Ethiopie et avec des acteurs et des techniciens éthiopiens. Pour incarner Maeza il a choisi une des comédiennes les plus populaires en Ethiopie afin de faire bénéficier le personnage de l’avocate de la sympathie des spectateurs pour l’actrice.

En conclusion, on ne peut qu’approuver le propos d’Angelina Jolie qui s’est faite ambassadrice du film : « Ce film s’appuie sur la richesse de la culture éthiopienne et montre comment d’importants progrès juridiques peuvent être réalisés dans le respect de la culture locale. » Le réalisateur dit souhaiter que son film contribue à la lutte pour les droits des femmes. Nous ne pouvons que le souhaiter. Du moins l’entreprise vaut-elle d’être soutenue.

 

Difret
Ethiopie, 2014
Réalisation : Zeresenay Berhane Mehari
Durée : 1h39
Production : Mehret Mandefro et Leelai Demoz
Distribution : Ad Vitam

 

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